La pause et autres pertes de contrôle

« SVP ne prends pas mon silence des prochains jours comme du boudage, mais j’pense que j’ai besoin d’une pause. »

Pour la première fois de ma vie, je venais de caller un break! C’est horrible, je sais. Je suis à l’aube de la quarantaine et je me sentais comme une ado qui dealait mal avec ses hormones.

Quand un des deux évoque un temps de réflexion c’est souvent parce que son idée est déjà faite, mais qu’il espère que l’autre prendra l’ingrate décision. Oui, une pause, c’est trop souvent la prémisse d’une rupture.

La pause, c’était mon mécanisme de défense. Je me sentais lésée voire prise au piège dans une relation qui avait toutes les qualités pour réussir, mais aussi plusieurs défauts pour échouer. Je ne pouvais plus reculer, mais je me devais de réfléchir avant de décider si je voulais oui ou non continuer d’avancer. Je voulais être certaine de ne pas agir sur un coup de tête, dire les choses qu’il ne fallait pas ou PIRE celles qu’il fallait.

J’aurais pu bullshiter le principal intéressé en lui disant que je le faisais pour NOUS, prétextant que prendre de la distance « nous ferait du bien », mais comment prétendre connaitre ce qui «nous» ferait du bien? Oui, je nous reprochais de ne pas nous voir assez souvent et maintenant je souhaitais arrêter qu’on se voit, oui tout était ironique dans cette décision. Car une pause, quelques fois, c’est aussi un moyen de savoir si on peut vivre sans l’autre.

J’aurais pu aussi être de mauvaise foi et lui souligner au crayon gras rouge, qu’il aura maintenant TOUT son temps pour lui et qu’il sera bien sans moi! La fameuse technique «manipulation» : espérer quand le repoussant, il revienne, tel un boomerang, avec un bouquet de promesse et des chocolats fourrés au «je t’aime». Et ensuite s’étonner s’il ne revient pas? Non merci.

Finalement, j’aurais pu être hypocrite et utiliser cette pause comme une jolie carte blanche pour aller voir « ailleurs si j’y suis » et lui revenir ensuite avec l’excuse que, techniquement, on n’était pas vraiment vraiment ensemble.

Non, je me suis contentée d’être égoïste. Cette pause, je la faisais POUR MOI.

LBF STOP panneau

En vérité, tout allait trop vite dans ma tête, comme un film, je devais rewinder car il semblait me manquer d’importantes informations pour pouvoir continuer l’histoire. L’histoire de ce que j’avais encore de la difficulté, même après un an, à appeler un couple.

La nôtre n’avait rien d’une grande histoire d’amour et c’était bien là le principal problème (pour moi). C’était pas encore la fin, mais disons que je n’excluais pas de commencer à écrire le générique.

Dans le sport, le temps d’arrêt est fréquemment utilisé par le joueur (ou l’équipe) en désavantage, afin de revoir sa stratégie pour surmonter, voire gagner la partie. Ici, la partie, c’était ma relation et OUI, malgré que j’étais en infériorité numérique, je voulais la « sauver » et non ME sauver.

Le désavantage numérique.

C’était pas un reproche, mais une constatation: le copropriétaire de mon couple était dans une situation confortable, par conséquent, il est logique qu’il ne ressentait aucunement le besoin de changer quoique ce soit. De mon bord, je vivais constamment dans le compromis. J’avais cette impression que c’est moi qui devais faire des efforts et que lui, optait toujours pour la facilité, sa vie étant déjà assez complexe, se justifiait-il. En fait, comme je lui avais exposé: je crois que tout ça, c’était juste une question de contrôle.

Parce qu’il a toujours été celui qui avait le contrôle; il décidait quand on allait se voir, il avait le pouvoir de changer nos plans, d’annuler comme bon lui semblait prétextant que ses dispos à lui étaient plus restrictives. Je ne m’étais d’ailleurs nullement étonnée, que si on emménage ensemble, c’est MOI qui devra aller le rejoindre, parce que « c’est clairement plus simple ».

Bref, qu’il l’ait choisi ou pas, ce contrôle il l’a ou plutôt il l’avait, jusqu’à ce que je vienne perturber son jeudi soir avec ma requête de pause. Elle n’était pas tombée du ciel, il savait que je n’allais pas très bien depuis un moment et que je remettais en question beaucoup de trucs dans ma vie et que notre relation, n’y échapperait pas et avec raison.

LBF take-control

Là, pour la première fois en un an, j’avais l’impression d’avoir le contrôle. Avec cette pause, c’est comme si du coup, il devenait celui qui « ne savait pas » qui devait attendre et qui vivait dans le flou.

Attention, je ne prenais pas plaisir à le faire mariner dans son jus et non je ne voulais pas qu’il « comprenne des affaires. » Il disposait de toute l’information nécessaire, mais avec ce break, il devait avoir l’impression que quelque chose lui échappait.

Oui moi.

Par conséquent et sans grande surprise, il est venu briser mon moment de réflexion à coup de « je m’ennuie », « j’ai besoin de toi », me donner ses disponibilités et me demander quand nous allions nous revoir pour discuter? C’était son moyen à lui de garder le contrôle sur cette situation je suppose?

Pis là, je l’aurais deviné: il s’est mis à me parler d’avenir! Je ne suis pas architecte, mais me semble que c’est difficile de construire quelque chose de solide quand le présent est chambranlant, non? Et c’était surtout pas le bon moment.

Parenthèse: une pause est à 90% provoquée par une remise en question, ajouter de nouvelles données et parler du futur, même avec toutes les bonnes intentions du monde, n’aident pas même que ça complique la procédure. Fin de la parenthèse. 

Mais je ne lui en veux pas, sa réaction était normale face à cet imprévu. Une pause, c’est un moment où celui qui la commande ne sait pas toujours à quoi réfléchir, pas plus que celui qui la subit d’ailleurs et qui se sent obligé d’entamer, lui aussi, une période de méditation.

En fait, ce dernier peut difficilement rester assis les bras croisés! Parce qu’un break, avouons-le, est ordinairement déguisé en ultimatum. On dirait que ça vient avec un compte à rebours, alors l’autre se sent acculé au pied du mur et se demande ce qu’il peut faire/dire RAPIDEMENT pour convaincre l’autre de ne pas partir!

LBF panic

Pourtant, si on aime vraiment la personne et qu’on a confiance en son jugement, faut savoir respecter son besoin de s’éloigner pour quelque temps. Si le temps demandé est raisonnable bien sûr! Si t’es pour prendre une pause de six mois, aussi ben dire que tu magasines chez « Plan B dépôt » !

Autre parenthèse: oui, il est vrai que si on accepte facilement une pause imposée, cela peut se traduire comme du je-m’en-foutisme, voilà pourquoi il est important de signaler à la personne qu’on respecte son choix, même si c’est difficile, mais qu’on croit en la survie du couple. Sauf évidement, si vous sentez que la justification du break c’est du gros n’importe quoi. Fin de la deuxième et dernière parenthèse. 

Quitter pour mieux revenir?

LBF bonhommesHonnêtement, j’espérais  que cette pause remue quelque chose chez moi et non chez-lui. Quoique, j’vous mentirais si je vous disais que secrètement je ne voulais pas savoir si (je?) on se manquait vraiment. Oui, je suis consciente qu’il aurait pu faire «fuck it», mais il ne l’a pas fait. Peut-être parce que tout ça, lui, moi, la pause, en fin de compte ça voulait dire quelque chose?

J’ai réalisé que nous étions deux «je» et deux «je» ça fait rarement un beau «nous». Je lui en demandais peut-être trop? Il en donnait peut-être pas assez? Ce manque d’enthousiasme qu’il attribuait à de vieilles habitudes de célibataire ne justifiait pas que je passe souvent en dernier. À chaque fois qu’il en donnait un peu plus aux autres; son boss, ses enfants, sa famille, son ex, il devait s’assurer que ça ne soit pas toujours à moi qu’il en donnait moins.

Bref, je me demandais si l’attente, les questionnements, les compromis, les déceptions, en valaient la peine? Parce que oui, de la peine j’en avais. Une relation est supposée être facile, et là, elle se compliquait royalement.

JE la compliquais.

En fait, j’essayais juste te trouver une réponse à ma question: était-ce si important qu’il ne soit pas le bon?

«Et pourquoi tu dis que ce n’est pas le bon?» m’avait demandé une amie attristée.

Peut-être parce qu’il ne m’avait jamais fait sentir que j’étais la bonne.

LBF qui a survécu à un break.

26 juillet- Kill Bill - Copie