« Il n’y a rien de plus beau et excitant que de posséder une clé, tant qu’on ne sait pas ce qu’elle ouvre. »
Vous rentrez un lundi matin au boulot, tout vous semble comme à l’habitude, vous chantonnez même la petite toune de l’ascenseur qui vous restera probablement dans la tête pendant tout l’avant-midi. Mais pas ce matin car, pour une raison obscure, votre clé n’ouvre plus votre porte de bureau?
On a changé la serrure durant le weekend? Pas de mémo rien. Étrange. Pas de panique, il y a sûrement explication: un changement de local vous semble la meilleure hypothèse.
Pourtant, personne ne semble disposé à fournir des réponses à vos questions. Vous écrivez un courriel à votre supérieur, vous essayez de le rejoindre par téléphone, vous lui laissez un ou deux messages, des textos.
Rien. Niet. Nada.
Bon ok, est-ce un problème de clé? de communication? Est-ce un moyen très ordinaire de vous dire que vous n’êtes plus le bienvenu dans la compagnie? Pourquoi vous mettrait-on à la porte alors que vous exécutiez bien votre travail? Qu’est-ce qui s’est passé?
Vous cherchez le réconfort autour d’une bière avec vos amis et chacun a son opinion sur le sujet :
-Bah! Le message est clair, trouve-toi une autre job!
-Ton boss est vraiment cave, j’le savais quand t’as commencé à travailler là que c’était pas un emploi pour toi. Aweye! Passe au suivant, next!
-Pauvre-toi! Ton patron est un monstre, c’est inhumain. Tu mérites un meilleur travail avec de meilleures conditions.
Oui, mais vous l’aimiez ce boulot! Pas plus tard que le vendredi d’avant on vous avait complimenté, vous rappelant que vous étiez un employé exemplaire en vous laissant même miroiter une promotion! Vous vous dites qu’il y a malentendu et que tout devrait rapidement rentrer dans l’ordre.
Et si on vous disait que vous êtes naïf et que vous souffrez de dépendance au travail? Après tout, il ne fallait pas trop vous y attacher, vous étiez là que depuis trois mois! On vous a remercié. Voilà. À quoi vous vous attendiez? Une petite carte avec des fleurs? Un télégramme chanté?
NON. Parce qu’il y a des règles établies et qu’il existe les normes du travail. On ne peut pas renvoyer quelqu’un sans raisons valables (même si souvent le motif reste discutable), car vous êtes PROTÉGÉS.
Quant est-il de L’AMOUR???
Hélas, il n’y aura jamais les normes des relations amoureuses. Par conséquent, il y aura toujours des abus et des cas de congédiement sans justification. On peut décider, du jour au lendemain, de ne plus donner signe de vie ni de faire suite à vos appels. Eh oui! On peut disparaître en décidant tout simplement de « changer la serrure ».
Vous êtes sous le choc, déstabilisé, un mélange de colère et d’incompréhension. Étrangement, si vous cherchez à obtenir un minimum d’explications, on vous dira que vous souffrez probablement de dépendance affective (un classique!).
Malheureusement, en amour, quand notre clé n’ouvre plus la porte, ce n’est jamais pour un cas de réaffectation! Il n’existe aucun programme gouvernemental pour vous aider dans votre démarche pour trouver « quelqu’un d’autre ». Vous n’avez pas droit non plus au 4%, cette « compensation » pour vous aider à digérer la nouvelle et subvenir, temporairement, à vos besoins affectifs.
Eh non, comme un travailleur illégal : vous vous retrouvez à la rue de vos sentiments, sans recours possible. Oui c’est injuste, mais c’est comme ça. D’un autre côté, il serait plutôt ridicule de donner un deux semaines de préavis avant une rupture!
Bien sûr, vous pouvez risquer d’envoyer une mise en demeure sous fond de vengeance, mais vous savez que la bataille est perdue d’avance. Si vous connaissez d’autres personnes ayant subit le même sort avec ce bourreau des coeurs, peut-être pouvez-vous intenter un recours collectif?
Sérieusement, même si on vous offrait de revenir? Accepteriez-vous de retourner « travailler » pour cette relation, sachant que vous avez déjà le pied coeur dans la porte?
Ce qui différencie l’employé floué des vrais dépendants affectifs : le dépendant retournera lui, peu importes les conditions proposées.
En amour, il n’y a aucune loi alors pourquoi s’efforcer d’éclaircir les décisions prises au dessus de vous.
Ainsi, on veut éviter la confrontation, la crise de larme et surtout de devoir répondre à des questions.
Est-ce un problème d’assiduité? On n’effectuait pas bien les tâches demandées? Naturellement, il est inutile de se noyer dans nos suppositions et d’attendre, en vain, des justifications qui n’arriveront jamais. Oui, changer la serrure, c’est de la lâcheté.
Le monde de l’amour est comme celui du travail : impitoyable!
Il n’y a pas si longtemps, la bonne fille s’est fait elle aussi « remercier », mais sans clarifications. Étant laissée avec toutes ses interrogations et se sentant comme la dernière des incompétentes, elle en a déduit qu’elle était sûrement victime du « manque de travail ».
En effet, monsieur ne disposait pas d’assez d’heure pour elle, trop occupé. C’est plate comme explication, mais c’est mieux que le fameux conflit de personnalité, même si cette excuse cache trop souvent l’embauche d’une nouvelle personne.
(LBF souhaite seulement ne pas avoir été remplacée par une machine!)
Mais quand ça lui arrive, elle se retrousse les manches, elle revoit son CV et ajoute ce licenciement à ses expériences de vie. Rappelez-vous que la clé de votre coeur ne déverrouille pas qu’une seule serrure. Cependant, soyez prudent avant de faire un « double » de votre clé pour quelqu’un.
Pour LBF, ce n’était qu’un poste de stagiaire, mais il y avait tout de même de belles perspectives d’avenir, c’est pourquoi, se retrouver chômeuse d’amour peut avant la période des fêtes, c’était un sale coup!
Et puis, ironie du sort: il travaillait pour un serrurier.
Fin de la séance 27