« Y’a juste les folles qui ne changent pas d’idées! ».
Après plusieurs semaines à m’exposer la madame sur un site de rencontres, j’ai dû faire un constat : plusieurs de mes préjugés étaient tombés pour faire place à de nouveaux! Mais mon expérience restait somme toute positive bien que peu naturelle comme approche.
Il me suffisait de lire quelques résumés de profils pour comprendre que je n’étais pas la seule à penser ainsi. Certains se demandaient clairement ce qu’ils faisaient là, dans ce Toys ‘R’us pour célibataire et d’autres, plus optimistes, voyaient cette expérience comme celle de la dernière chance.
La fameuse phrase « on ne sait jamais là où ça peut nous mener » était celle qui, de loin, reflétait le mieux ma pensée. Par contre, je la trouvais trop cucue pour l’inclure dans ma propre fiche. Beaucoup qualifiaient le site de rencontre de véritable « catalogue Sears d’humains » et celui d’automne-hiver pour lequel je posais fièrement, était assez bien garni.
J’espérais donc recevoir des messages de ceux qui, en feuilletant la section « trentenaire prêt à porter », s’attarderaient sur ma page. Parce que, malheureusement, le catalogue était conçu de manière à ce que les dames ne pouvaient pas commander le modèle qui les intéressait** et devaient ainsi attendre de se faire magasiner courtiser.
* sauf moyennant certains frais
Et de la courtise j’en ai eu.
En tout une bonne trentaine de messages : un poète bisexuel, des hommes mariés cherchant une femme discrète, une femme qui s’était probablement perdue dans cette épicerie de la cruise, des touristes de « passage », un sexagénaire, etc.
En fait, j’étais plutôt étonnée de recevoir ce genre de message, malgré que j’aie précisé que j’aspirais à une relation sérieuse. ll me manquait juste le petit couple louche désireux de pimenter sa vie sexuelle, pour que mon expérience « site de rencontres » soit complète!
Déçue, j’étais.
Il y avait aussi ce mec qui m’a posé deux questions simples : ce que je faisais dans la vie et s’il pouvait connaître mon vrai prénom. De toute évidence il n’a pas apprécié mes réponses, car je n’ai plus jamais entendu parler de lui. Soit qu’il n’aimait pas mon prénom (on serait deux!) ou qu’il avait des préjugés concernant le métier de femme à barbe dans un cirque ambulant.
Donc, après avoir ignoré les messages génériques tels « votre fiche m’a renversé, nous pourrions discuter », ceux avec les pseudos douteux du genre « grospénis69» et les ex-détenus, j‘ai entamé la correspondance SÉRIEUSE avec deux gentils garçons ayant quelques points en commun :
- Êtres célibataires (un préalable).
- Avoir une belle plume et un humour sarcastique (non négligeable).
- Manisfester de l’ intérêt pour une fille dont ils ignoraient l’apparence (une mention pour le courage).
- Habiter la Rive-Sud (qui ne figurait pourtant pas dans mes critères de base).
Sinon, ils étaient assez différents, mais avaient chacun un charme qui leur était propre.
Avant de m’inscrire, je me rappelais avoir froidement jugé une amie qui prenait plaisir à échanger avec des hommes sans jamais les rencontrer. Je trouvais ça ridicule puisque son but était de trouver quelqu’un pour partager sa vie et non un ami-correspondant! Je me disais que MOI, si j’étais sur ces sites, j’allais vouloir rencontrer la personne le plus tôt possible, question de ne pas faire perdre de temps à personne!
COUP DE THÉÂTRE! Je me suis surprise à apprécier entretenir une relation virtuelle. J’avais hâte de lire la missive de mes Rives-Sudois et eux attendaient la réponse de la bonne fille avec empressement. Bref, on se donnait du soleil dans nos journées respectives. J’étais bien forcée de constater que le site de rencontres allait me faire pratiquer la patience : pour la fille plutôt « rapide » que j’étais, je sortais in-extenso de ma zone de confort.
Cependant, comme dans tous bons triangles, j’ai développé plus d’affinité avec l’un des côtés.
Ainsi, après trois semaines à se raconter nos vies en négligeant les passages plates, à se taquiner et à répondre à des questions d’ordre biographiques, mon « préféré » à suggéré une rencontre.
En fait, j’aurais accepté après une semaine, mais ça, il ne faut pas lui dire chuuuuuuut!
Enfin, j’allais découvrir le son de sa voix, de son rire, ses gestes et manies. Bien sur, je priais le dieu des sites de rencontre que derrière le charme de ses écrits, ne se cache pas le champion des bullshiteux.
Finalement, c’est dans un resto, autour d’une salade (à défaut de pouvoir vendre la mienne, j’en mangeais une) que je me suis retrouvée devant un véritable gentleman aussi stimulant intellectuellement que physiquement.
Il était exactement comme dans le catalogue!
On venait de domaines complètement opposés, on avait aucun véritable point d’encrage, on arrivait de deux planètes et pourtant on parlait le même langage.
Et c’est là que j’ai compris à quoi servaient les (crisses de) sites de rencontres : provoquer le destin de deux âmes perdues qui, dans la vie, ne se serait probablement jamais rencontrées, du moins pas de manière impromptue dans la section des surgelés.
Parce qu’on s’entend : faudrait me payer cher pour que je fasse mon épicerie sur la Rive-Sud…
LBF.
Fin de la séance 18